Quand nous pensons « Art Populaire » (ou Pop Art), nous pensons à un art parfaitement ancré dans notre culture, qu’elle soit locale ou universelle. Un art que nous avons un jour croisé dans notre vie, parfois même sans que nous y ayons prêté attention. Mais dans cas, pourquoi le qualifie-t-on d’art ? Comment est-il venu à nous malgré la différence entre amateur et collectionneur d’art ? Perdrait-il alors de sa valeur dans le Marché de l’art et la société actuelle ?
Publié le 22 Juin 2017 par Sophie Mahon
Whaam !, 1963
Roy Lichtenstein
TATE Modern, Londres, UK
Crédits photos : © TATE
Posons d'abord les bases. Selon le Larousse, Art signifie « création d’objets ou de mises en scène spécifiques destinées à produire chez l’homme un état particulier de sensibilité, plus ou moins lié au plaisir esthétique ». Et Populaire « qui s’adresse au peuple, au public le plus nombreux, qui est conforme aux goûts de la population la moins cultivée ». Que pouvons-nous en déduire si nous regroupons ces deux mots ensemble ? Qu’il s’agirait donc d’un art issu de la culture de masse, reconnu et apprécié comme étant de l’art par la majorité de la population, qu’elle soit connaisseuse ou non.
Untitled from Marilyn Monroe, 1967
Andy Warhol
Crédits Photos : © MoMA
Fin des années 50, nous sommes en plein boom culturel. C’est le début des Trente Glorieuses. Le Pop Art prend alors sa source dans cette culture de la consommation en extrayant des objets de leur contexte, pour ensuite les isoler. Cette démarche apporte ainsi un tout autre regard à l’image. Par ailleurs, elle souligne aussi la place importante qu’ont les publicités et médias sur nos décisions de consommateurs. Des œuvres de grands maîtres comme Roy Lichtenstein (photo en-tête), Keith Haring, Robert Indiana apparaissent, et font parties aujourd’hui des œuvres les plus chères du Marché de l’art.
Au sujet de l'artiste le plus célèbre de ce courant, Andy Warhol. Si vous ne vous considérez pas comme un grand connaisseur de l'Histoire de l’art, vous allez me répondre automatiquement : « oui mais je connais peu son œuvre ». Certes. Et pourtant vous la connaissez. Pourquoi ? À un moment dans votre vie, vous avez très certainement aperçu une œuvre de lui. Sans doute, vous en possédez une reproduction. Marilyn Monroe par exemple. Vous l’avez aperçu où ? Au Musée ? En reproduction chez un ami ? Sur des objets de la culture de masse (agendas, tee-shirts, etc.). Oui, tel était le but de ce cher Andy Warhol. En devenant aux États-Unis un des principaux artistes d’un courant appelé le Pop Art (‘art populaire’ en français).
Si en effet ces œuvres issues de l’Art Populaire coûtent très chères, ou ne sont destinées qu’à des musées, comment avons-nous réussi à y accéder, autre que les livres et les reportages ? Comment pouvons-nous les posséder ? Quels seraient les médiums utilisés ?
Des pistes : consommation de masse, donc médiums accessibles à tous, qui se faufileraient dans notre vie, parfois sans que nous nous en apercevions. Des médiums sont alors produits en masse. Nous pensons à quoi ? Photographie, impressions, bandes dessinées, dessins animées, mangas, publicités, etc. En clair les médiums utilisés à la base par ces artistes, mais dont le rôle a été conservé, parfois détourné.
Robert Indiania, Keith Haring, plus récemment Jeff Koons, etc. Des noms qui parlent à beaucoup de monde, connaisseur ou non. Jeff Koons est « celui qui a exposé à Versailles », Keith Haring « l'artiste sur les tee-shirts chez Uniqlo». À un moment donc, cet art s’est présenté à vous, probablement sans que vous vous disiez « oui c’est de l’art populaire ». C’est en effet le but recherché : image de la consommation de masse, isolement, contemplation, valeur, production de masse vers le Marché de l’art et les produits de consommations, diffusion de l’image artistique.
Autre exemple, Shirow Masamune, l’auteur de Ghost in the Shell. D’abord publié au début des années 90 dans le journal japonais Young Magazine, ce manga connut une véritable consécration avec ses films d’animations et jeux vidéo. Même principe. Nous trouvons aussi dans les ventes aux enchères des planches ou magazines de l’époque de ce manga, vendus très chers. Les collectionneurs s’arrachent ces archives qui symbolisent l’évolution de ce manga, dont ils prendront le soin d’encadrer. Et pourtant, les films d’animations sont accessibles à tous sur internet. Il en va de même avec les jeux vidéo dans le commerce. Mais ils ne font que donner encore plus de valeur à ce manga.
En conclusion, l’art dit populaire est-il accessible à tous ? L’image oui. Sa valeur, même si elle ne reste accessible qu’à un petit groupe de collectionneurs fortunés capables d’acheter les sources de cette image, c’est ce que nous faisons de l’image qui rend sa valeur plus riche, par cette diffusion dans notre société de consommation. Plus l’image sera connue, plus elle aura de la valeur. En d’autres termes, nous avons tous un rôle à jouer, quelque soit notre portefeuille.
Ghost in the Shell
Bande dessinée paru de 1991