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ATTENTION : article pour public averti

SÉRIE :
Un Samedi érotique
Épisode 2 : des nus, des nus partout

Et si 2021 était une année érotique ? Depuis des siècles les arts se nourrissent des fantasmes les plus profonds du genre humain, de ses canons anatomiques, de ses pulsions et de son pouvoir de séduction. La Palette Dorée, produit par HASHT-ART propose chaque samedi de partir à la découverte de ce monde parallèle dans lequel nous aimons tant nous perdre. Vous pourrez intimement ou publiquement apprécier les formes et la luxure des œuvres d’art, ses scandales et ses chef-d’œuvres.

Publié le 16 Janvier 2021 par Sophie Mahon

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Le Jugement dernier (détail), 1536-1541

Michel-Ange (1475-1564)

Fresque, Chapelle Sixtine, Vatican

Dans l'imagerie populaire, Michel-Ange est un artiste florentin passionné, mondialement connu pour ses oeuvres telles que la grande sculpture du David à Florence, la plus grande partie des fresques de la Chapelle Sixtine au Vatican, ou encore le travail monumental de sa Pietà de 1499. Toute sa vie, Michel-Ange fut un artiste accompli et reconnu, mais surtout passionné et tourmenté. Derrière sa réputation, Michel-Ange était un amoureux du nu, du nu masculin. De cet amour découla des travaux de nus surprenants, magnifiques, et parfois énigmatiques, avec une recherche perpétuelle du détail, de la sensualité, et de l'humain. Considéré comme l'artiste du nu masculin dans l'Histoire, La Palette Dorée nous fait plonger dans l'univers artistique et sulfureux de cet artiste de la Renaissance, dont l'orientation sexuelle n'est plus un tabou, et sélectionné des oeuvres emblématiques et bouillantes.

Michel-Ange, un homosexuel pendant la Renaissance

De nombreux historiens s'accordent pour dire que les peintres Michel-Ange, Léonard de Vinci et peut-être Le Caravage étaient homosexuels. Au XVème et au XVIIème siècle en Italie, l'Homosexualité n'était pas très bien vue, mais était cependant assez acceptée. L'opinion publique commença à être plus tolérante envers les homosexuels, notamment grâce à la redécouverte des chef-d'oeuvres de l'Antiquité. Si les textes se montraient toujours aussi fermes, en pratique un certain Libéralisme réapparaissait. Les homosexuels trouvaient à travers l'Art un moyen de s'exprimer. Pendant toute cette période, les tableaux présentant des hommes nus se multiplièrent. Non seulement l'Homosexualité était largement répandue pendant la Renaissance, mais qu'elle fut une source majeure de création cette époque de l'Histoire Européenne, permettant également une remise en cause de la condamnation chrétienne du "péché de sodomie".

Cependant, certains artistes comme Léonard de Vinci furent condamnés par l'Église pour "sodomie active", après avoir été dénoncé anonymement. L’accusation était gravissime car elle pouvait conduire au bûcher. Après avoir été innocenté faute de preuves, l'artiste se montra plus discret sur sa vie affective et sexuelle. De son côté, Michel-Ange chercha également à préserver sa vie privée et ses penchants homosexuels, qu'il illustraient cependant dans ses oeuvres, allant jusqu'à chercher la Beauté parfaite. Certains historiens de l'Art s'accordent à dire qu'il s'agissait plus de pulsions refoulées par l'artiste, profondément croyant.

 

De la vibration dans les corps

Pendant toute sa vie, Michel-Ange fut en quête de la Beauté absolue. Dans ses sculptures ou fresques, l'artiste cherchaient à rendre ses figures les plus vivantes possibles. Pour cela, Michel-Ange avait obtenu l'autorisation de disséquer des corps, afin d'en connaitre les mécanismes. Vivantes mais aussi sensuelles, autant à la vue qu'au toucher. Cela passait par le choix du meilleur marbre de Carrare, le rendu de la peau la plus lisse possible, un travail détaillé des muscles et des veines. Surtout à une époque où le travail du nu était considéré comme la Beauté parfaite, créée par Dieu. De quoi remuer nos sens à la vue de ses figures, le plus souvent religieuses pourtant. De quoi nous faire commettre un véritable pêché de gourmandise ou de luxure.

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David, 1501-1504

Michel-Ange (1475-1564)

Marbre, Hauteur 434 cm

Galleria dell'Accademia, Florence, Italie

Le monde entier s'accorde pour affirmer que le David de Michel-Ange est sans doute l'oeuvre la plus sensuelle (pour ne pas dire sexuelle) du monde de l'Art, et la plus copiée après La Joconde. Que nous soyons connaisseurs ou non, tout le monde en a déjà entendu parler. Taillée dans un seul bloc de marbre, cette sculpture met en scène la préparation du jeune David avant son combat avec le géant Goliath, une histoire de l'Ancien Testament, et le symbole de la ville de Florence.

 

Cette oeuvre regroupe tous les canons artistiques et académiques de l'Art. Afin de donner du mouvement à son personnage, Michel-Ange utilisa la technique du contrapposto, une attitude du corps humain où l'une des deux jambes porte le poids du corps, l'autre étant laissée libre et légèrement fléchie. Ce qui ajoute également une grande sensualité au modèle, à la fois masculin et féminin. Au sujet des détails : les mains, les yeux, le sexe, les fesses, les mollets paraissent réels, proches de la perfection. Que nous soyons homme ou femme, cette sculpture ne nous laisse pas de marbre, bien au contraire. Michel-Ange, passionné par le nu, et surtout le nu masculin, laissa ses pulsions glisser le long du marbre qu'il tailla pendant 4 ans.

Un Christ viril, 400 fidèles nus 

Le 31 Octobre 1541, veille de la Toussaint, Michel-Ange dévoile sa fresque sur laquelle il travaille sans relâche depuis l'été 1536. La stupeur fait alors l'unanimité dans le public : chef-d'oeuvre absolu pour les uns, scandaleux outrage pour les autres. 

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Le Jugement dernier, 1536-1541

Michel-Ange (1475-1564)

Fresque, 14,90 x 13,30 m environ

Chapelle Sixtine, Vatican

Crédits photos : © France Culture

Un vrai mélange d'impudeur et de sensualité pour un sujet religieux. La nudité des personnages relance ici le débat sur l’iconographie catholique de l'époque : ­doit-on dénoncer la chair pécheresse, ou bien la glorifier car elle est, elle aussi, appelée à la résurrection ? Michel-Ange a sa propre théorie : pas une feuille de vigne pour couvrir les quelque quatre cents personnages de la fresque, un Jésus Christ viril, musclé comme un Hercule, sensuel comme un guerrier, le corps en plein mouvement, comme ni nous sentions la tension de ses pectoraux. De plus, la scène peut faire penser à une véritable orgie, où les corps se serrent et s'enlacent les uns contre les autres. Une tension sexuelle bien palpable. Michel-Ange offrit à la chapelle une vision torturée et douloureuse du jugement dernier, loin de la calme majesté des représentations habituelles.

Mais le scandale fut de trop. Le Pape Paul IV envisagea de détruire la composition, mais il se contenta d'en faire voiler pudiquement certains personnages par Daniele da Volterra, élève de Michel-Ange, qui y gagnera le surnom de Il Braghettone (le porteur de culotte). Au XVIIème siècle, le Pape Clément XII fera ajouter d'autres voiles. Cette entreprise se poursuivra encore en plein XXème siècle, sous le pontificat de Pie XI.

Aujourd'hui, l'agence de voyage italienne Quiiky propose même des visites à la Chapelle Sixtine sur la thématique gay, ayant pour but d’explorer la façon dont la sexualité de ces peintres a influencé certains de leurs tableaux. « Devant la fresque du Jugement Dernier dans la Chapelle Sixtine, nos guides montrent les deux hommes en haut à droite qui s’embrassent pour célébrer l’ascension au paradis », explique le directeur de l’agence au New York Times. Certains guides racontent aussi que la fréquence des visiteurs LGBT a augmenté depuis un certain nombre d'années, et affirme la tolérance du Pape François.

Un divin fessier

Restons dans la Chapelle Sixtine, et levons la tête vers les voûtes. Sur la huitième travée de la voûte La Création des Astres, représentant la création du soleil et de la lune nous apercevons... une lune ! Ou plutôt des fesses, appartenant au Dieu tout-puissant. 

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La Création des Astres, 1511

Michel-Ange (1475-1564)

Fresque, 280 x 570 cm environ

Chapelle Sixtine, Vatican

Peint de 1508 à 1512 (plus de 25 ans Le Jugement Dernier), le plafond de la Chapelle Sixtine raconte l'histoire de Genèse dans la Bible de l'Ancien Testament, répartie en neuf scènes. La voûte dont nous parlons se situe à la Création du Monde par Dieu en sept jours. Elle est la deuxième scène de la séquence chronologique du plafond, représentant le troisième et le quatrième jour du récit de la création sur le même panneau. Sur le côté gauche de la scène, Dieu est représenté de dos, tendant son bras vers un buisson, référence au monde végétal. Sur le côté droit, une autre image de Dieu,  pointant sa main droite vers le Soleil, et vers la Lune avec la gauche.

Et pourtant, un divin fessier se présente à nous. Un ensemble qualifié « d'obscène », très librement nourrie des pulsions homosexuelles de l'artiste, qui ne supportait pas beaucoup de contraintes à son expression artistique. La romancière et blogueuse Ariane Walter nous en propose une description sans concession : « Une floraison de croupes cambrées, de fesses rebondies, de cuisses ouvertes, de visages androgynes, de sexes enfantins, de muscles puissants jusqu’à la démesure. La beauté la plus sublime, virile, seule, même quand les sybilles sont des femmes et les visages féminins, les corps sont masculins. Si on ne le dit pas, on est aveugle. » (Agora Vox, 18/12/2010)

Michel-Ange monterait-il Dieu désirable et sensuel, au point d'amener le tout-puissant à commettre un véritable pêché de luxure ? Plus c'est interdit, plus c'est excitant pourrions-nous penser. Par ailleurs, le maître florentin amena ici une image plus humaine de Dieu, ce qui était recherché dans la Renaissance du Quattrocento en Italie, « l'humain devient divin et le divin humain ». Pourtant jugée scandaleuse, l'oeuvre est toujours présente aujourd'hui sur le plafond de la Chapelle Sixtine, suscitant étonnement, amusement et fantasme.

Nous pourrions parler pendant des heures du nombre incalculable de nus qu'a produit Michel-Ange. Grand maître de la Beauté et de la Sensualité, cet artiste de la Renaissance italienne a cherché toute sa vie la Perfection absolue dans son travail, laissant parler ses fantasmes et pulsions malgré la préservation de sa vie privée. Il nous laisse aujourd'hui sans doute les plus grandes références de nus, mais aussi les plus beaux fantasmes de l'Histoire de l'art. 

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